mercredi 2 avril 2014

Le ministère du pléonasme, de la répétition et de plusieurs fois la même chose

Il ne suffit apparemment pas aujourd'hui d'être ministre des affaires étrangères : il faut être "ministre des affaires étrangères et du développement international". Je ne vois pas ce que le "développement international" ajoute aux affaires étrangères (développement de quoi, d'ailleurs ? de la "présence française dans le monde", du "rayonnement de la France", de l'internationalisation, de l'internationalisme, de l'international ?)

L'épidémie de pléonasmes n'a pas touché ce seul ministère. Il a fallu ajouter à l'écologie le développement durable et l'énergie car nous aurions pu croire qu'elle les ignorait. La grandeur de l'éducation nationale exigeait qu'on lui ajoutât, comme si cela n'allait pas de soi, l'enseignement supérieur et la recherche. Le titre prestigieux de ministre des finances a été plombé, lui, par la triste symbolique qui accompagne les comptes publics.

Le ministère de l'économie est aussi celui du redressement productif : mais comment s'occuper de l'économie sans devoir redresser la production, qui en a tant besoin ? Et pour faire bonne mesure, on lui a ajouté le numérique.

Quand on dit "ministère de l'agriculture", on sait que cela recouvre l'agro-alimentaire et la forêt. Mais il a fallu le dire explicitement, car comme nous sommes ignares nous risquons de l'ignorer.

Un sommet est atteint par le ministère du travail, de l'emploi et du dialogue social : trois façons de dire une seule et même chose.

Quelques ministères empilent un catalogue disparate : ministère des droits de la femme, de la ville, de la jeunesse et des sports ; ministère de la décentralisation, de la réforme de l'Etat et de la fonction publique ; ministère du logement et de l'égalité des territoires ; ministère de la culture et de la communication.

Saluons cependant quelques dénominations d'une élégante sobriété : garde des sceaux, ministre de la justice ; ministre des affaires sociales ; ministre de la défense ; ministre de l'intérieur ; ministre des outre-mer.

A la complexité des dénominations correspond, on peut le craindre, une pensée qui fuit la clarté et la simplicité. Ce n'est pas bon signe.

On croit donner plus d'autorité aux ministres en empilant des badges sur leurs épaules mais on obtient le résultat inverse car les dénominations historiques portent, dans leur sobriété, un symbole plus puissant que ces accumulations.

De même, l'avez-vous remarqué ? la féminisation des dénominations professionnelles a un effet contraire à celui qu'elle visait : dire qu'une femme est professeure, écrivaine, etc., c'est suggérer qu'elle est autre chose qu'un professeur ou qu'un écrivain et donc qu'elle leur est peut-être inférieure.

La dégradation du vocabulaire fait des victimes parfois imprévues.

1 commentaire:

  1. Merci. La fin de votre billet m'a fait penser à votre billet du 2 décembre 2005 ( http://www.volle.com/opinion/maternelle.htm ) qui m'a fait penser à ce réquisitoire de l’inimitable Pierre Desproges (contre Sapho) du 16 novembre 1982 : https://youtu.be/12GRzgvFqnU

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