mardi 22 avril 2014

Iconomie, ce nouveau monde en émergence

Voici la vidéo de l'entretien avec Laurent Faibis consacré au livre iconomie :

vendredi 18 avril 2014

Les partenariats équitables dans l'iconomie

L'iconomie est l'économie du risque maximum en raison de l'importance des coûts fixes dans le coût de production : la quasi-totalité de celui-ci est en effet dépensée avant que l'entreprise n'ait vendu la première unité et reçu la première réponse du marché.

Dans l'iconomie la plupart des produits seront donc élaborés par un réseau d'entreprises partenaires car cela permet de réduire le risque que supporte chaque entreprise. Une autre raison milite pour le partenariat : chaque produit étant un assemblage de biens et de services, les « effets utiles » qu'il procure au client nécessitent l'intervention d'acteurs aux compétences diverses.

Au cœur du partenariat se trouve une plate-forme d'intermédiation qui a pour rôle:
  1. d'assurer l'interopérabilité du processus de production en introduisant, entre les systèmes d'information des partenaires, la passerelle qui assure une fonction de traduction et de commutation ;
  2. d'assurer le traitement des « effets de commerce » qui circulent entre les partenaires en procurant au partage des dépenses et recettes la transparence qui garantit son honnêteté.
L'investissement initial comporte le design du produit, l'ingénierie de sa production (conception et programmation des automates, organisation des services, définition du système d'information) et l'ingénierie d'affaire qui monte le partenariat en établissant le contrat qui répartit les responsabilités, recettes et dépenses, et en mettant en place la plate-forme d'intermédiation qui assurera le suivi de la réalisation de ce contrat.

Mais comment faire pour que le partenariat soit équitable ?

dimanche 13 avril 2014

La vie d'un système d'information

(Exposé de Laurent Bloch, Jacques Printz et Michel Volle lors de la réunion de l'institut de l'iconomie le 10 avril 2014)

Un système d'information est un être vivant : il naît, il évolue et se renouvelle, il connaît des incidents et des accidents, il se métamorphose même, mais il mourra le jour où l'institution qu'il sert disparaîtra – car aucune institution, aucune entreprise n'est éternelle.

Ses utilisateurs ne font que trois choses : ils lisent, ils écrivent et ils lancent des traitements. Il met à leur disposition quatre choses : des mémoires, des processeurs, des logiciels et un réseau. Vu comme cela, l'affaire peut sembler très simple...


Les langages

… mais dès que l'on a dit « les utilisateurs lisent et ils écrivent », cela implique toute la complexité de l’ingénierie et du langage.

Les utilisateurs conversent entre eux en utilisant le langage naturel, moyen de communication dont la puissance est gagée par une imprécision : tous les mots du langage naturel sont en effet entourés de connotations suggestives mais floues.

L'action technique, qui concerne des choses et des actions professionnelles, exige au contraire un langage précis, dépourvu de connotations et donc strictement conceptuel. Outre les connotations, elle bannit les synonymes et les homonymes qui sont autant de sources de malentendus.

La première étape de la construction d'un système d'information réside dans l'élaboration d'un langage conforme aux exigences du métier : il faut que toute l'entreprise, et même certains clients/partenaires dans le cas de l’entreprise « étendue », parle la même langue sans homonymes ni synonymes ; il faut que cette langue respecte des règles logiques formelles de complétude et de cohérence, indépendantes des opinions des usagers (« context-free ») ; il faut que les concepts qu'elle utilise soient pertinents (c'est-à-dire adéquats à l'action productive).

L'ingénierie du système d'information doit mobiliser la technique informatique de façon à satisfaire les besoins des utilisateurs (et non de répondre à leur demande, car celle-ci n'est le plus souvent qu'une traduction erronée du besoin).

Lorsque le système d'information utilise l'informatique, les données saisies et les ordres de traitement sont traduits en une cascade de langages intermédiaires avant de parvenir aux processeurs sous la forme d'instructions élémentaires écrites en 0 et 1 : le langage du processeur est celui des opérations physiques, qui n'est ni celui des êtres humains, ni celui de la logique pure.

samedi 12 avril 2014

Les études économiques en support des nouveaux services

(Exposé du 10 avril 2014 devant l'AHTI - Association pour l'Histoire des Télécoms et de l'Informatique)

J'arrive au CNET en 1983 à l'invitation de François du Castel pour y monter une « mission d'études économiques ». Cette mission devait éclairer la perspective de la diversification des services sur les réseaux télécoms en coopération avec l'équipe de Patrice Flichy qui, elle, menait des recherches sur la sociologie des usages.

Le service téléphonique avait en effet pratiquement atteint sa pénétration finale après l'effort d'équipement lancé à partir de 1974. L'énergie acquise par la DGT dans cette période de vive croissance se cherchait de nouveaux débouchés : ce sera le Minitel, puis le Plan Câble.

Je venais de l'INSEE et ne connaissais rien aux télécoms. Il a donc fallu que je me mette à l'école comme un bizut en lisant des livres, en écoutant les chercheurs du CNET et surtout les explications que me donnait généreusement du Castel.

J'ai eu bien du mal à comprendre la diversité des télécoms : le codage numérique du signal vocal, le modèle en couches, les règles d'ingénierie et la hiérarchie des commutateurs du réseau général, l'architecture de Transpac, le protocole Ethernet sur les réseaux locaux d'établissement, etc. Il faudra que je fasse un cours sur les techniques télécoms à l'ENSPTT pour assimiler enfin leur vocabulaire, leurs principes et leur méthode. Je suis étonné quand je vois un inspecteur des finances accepter de prendre la présidence du gigantesque automate qu'est le réseau télécom sans éprouver apparemment la moindre inquiétude...

*     *

Les gens des télécoms croyaient, ou affectaient de croire, qu'un économiste est un avocat payé pour faire des calculs complaisants à l'appui des projets qu'on lui demande de défendre. Ce n'était pas ainsi que je concevais mon métier et d'ailleurs du Castel ne m'a jamais demandé rien d'autre qu'un travail honnête.

Je respectais pour ma part beaucoup le sérieux professionnel des télécommunicants. Ils se partageaient entre deux spécialités : les « transmetteurs », qui sont des physiciens, et les « commutants » qui sont des logiciens, et ils adoraient littéralement leur métier historique, la téléphonie filaire. Cela me changeait agréablement de l'INSEE où la statistique – qui occupe l'essentiel des effectifs – était alors moins considérée que la comptabilité nationale, les modèles économétriques et la théorie économique.

mercredi 2 avril 2014

Agir pour l'iconomie : quelle stratégie adopter ?

(Exposé au colloque organisé par le CIGREF, Xerfi et l'institut de l'iconomie le 14 mars 2014)



Dans une entreprise, dans une institution, dans un pays, la fonction du stratège est d'indiquer une orientation, de poser à l'horizon du futur un repère qui oriente les volontés et les actions.

Aucune prospective, aucune stratégie ne pouvaient être pertinentes au XIXe siècle si elles ignoraient la mécanique et la chimie. Aucune ne peut l'être aujourd'hui si elle ignore l'informatisation. Dans le monde que celle-ci fait émerger, l'iconomie est un repère.

Les machines mécaniques ont percé les montagnes pour le chemin de fer, ont été les auxiliaires de la main d'oeuvre sur les chaînes de fabrication et des jambes pour les transports, ont industrialisé l'agriculture avec la chimie des engrais. L'informatisation transforme elle aussi la nature à laquelle sont confrontées les actions et les intentions car elle met en œuvre une ressource naturelle inépuisable : le cerveau humain. Ceux qui ignorent cela ne peuvent rien comprendre au monde dans lequel nous vivons aujourd'hui.

Jeremy Rifkin a donc tort lorsqu'il dit que la « troisième révolution industrielle » est celle de la transition énergétique, car celle-ci ne peut se concevoir qu'en tenant compte de la transition iconomique.

Après une révolution industrielle la macroéconomie est inopérante parce que les facteurs de crise résident dans la microéconomie, dans l'intimité des organisations et des processus : c'est là qu'il faut aller les dénicher.

L'informatisation a en effet des conséquences dans l'économie des entreprises, la psychologie des personnes, la sociologie des pouvoirs, la philosophie des techniques de la pensée et jusqu'aux valeurs qui orientent le destin des personnes, celui des institutions et celui des nations.

Si la technique apporte un Big Bang qui a transformé la nature, les conséquences de ce Big Bang outrepassent donc la sphère de la technique. Les blocages que l'informatisation rencontre s'expliquent par la crainte que ces conséquences suscitent.

Le ministère du pléonasme, de la répétition et de plusieurs fois la même chose

Il ne suffit apparemment pas aujourd'hui d'être ministre des affaires étrangères : il faut être "ministre des affaires étrangères et du développement international". Je ne vois pas ce que le "développement international" ajoute aux affaires étrangères (développement de quoi, d'ailleurs ? de la "présence française dans le monde", du "rayonnement de la France", de l'internationalisation, de l'internationalisme, de l'international ?)

L'épidémie de pléonasmes n'a pas touché ce seul ministère. Il a fallu ajouter à l'écologie le développement durable et l'énergie car nous aurions pu croire qu'elle les ignorait. La grandeur de l'éducation nationale exigeait qu'on lui ajoutât, comme si cela n'allait pas de soi, l'enseignement supérieur et la recherche. Le titre prestigieux de ministre des finances a été plombé, lui, par la triste symbolique qui accompagne les comptes publics.

Le ministère de l'économie est aussi celui du redressement productif : mais comment s'occuper de l'économie sans devoir redresser la production, qui en a tant besoin ? Et pour faire bonne mesure, on lui a ajouté le numérique.

Quand on dit "ministère de l'agriculture", on sait que cela recouvre l'agro-alimentaire et la forêt. Mais il a fallu le dire explicitement, car comme nous sommes ignares nous risquons de l'ignorer.

Un sommet est atteint par le ministère du travail, de l'emploi et du dialogue social : trois façons de dire une seule et même chose.

Quelques ministères empilent un catalogue disparate : ministère des droits de la femme, de la ville, de la jeunesse et des sports ; ministère de la décentralisation, de la réforme de l'Etat et de la fonction publique ; ministère du logement et de l'égalité des territoires ; ministère de la culture et de la communication.

Saluons cependant quelques dénominations d'une élégante sobriété : garde des sceaux, ministre de la justice ; ministre des affaires sociales ; ministre de la défense ; ministre de l'intérieur ; ministre des outre-mer.

A la complexité des dénominations correspond, on peut le craindre, une pensée qui fuit la clarté et la simplicité. Ce n'est pas bon signe.

On croit donner plus d'autorité aux ministres en empilant des badges sur leurs épaules mais on obtient le résultat inverse car les dénominations historiques portent, dans leur sobriété, un symbole plus puissant que ces accumulations.

De même, l'avez-vous remarqué ? la féminisation des dénominations professionnelles a un effet contraire à celui qu'elle visait : dire qu'une femme est professeure, écrivaine, etc., c'est suggérer qu'elle est autre chose qu'un professeur ou qu'un écrivain et donc qu'elle leur est peut-être inférieure.

La dégradation du vocabulaire fait des victimes parfois imprévues.